Gone Girl
Fincher aime réellement les histoires et les personnages sombres, non pas parce qu'ils ont un potentiel rédempteur, ni parce qu'ils sont potentiellement édifiants, juste parce qu'ils sont fascinants. Il faut reconnaître qu'à deux exceptions près (et encore, un des deux me semble assez limite, quand on y réfléchi bien), aucun personnage ne sort indemne de cette satire au vitriol qui fait parfois rire, mais dont la forme et le fond sont en réalité glaçants. Aucun d'eux ne fait réellement d'effort pour être aimable (au sens premier du terme); le paradoxe, c'est que, tout haïssables qu'ils sont, ils sont terriblement attachants: Prisonniers de leur rôle social et presque entièrement programmés par celui-ci, ils sont, dans le fond, tous des victimes.
La satire porte aussi sur de nombreux travers de la société américaine (dont certains sont également partagés par le reste du monde "occidental"), comme l'emballement médiatique, la bien-pensance des classes moyennes, l'institution du mariage (c'est quand même le thème central du film) et même un peu le système judiciaire. Fincher ne laisse que des ruines de tout cela, et se garde de donner ne serait-ce que des pistes pour la reconstruction.
Les acteurs sont impeccables (Pour ceux qui ne seraient pas clients: Oui, oui, même Ben Affleck (visionnage fait en présence d'une Afflecko-Sceptique convaincue)) et livrent à merveille toute l'ambiguïté de leurs personnages (à moins que j'ai loupé quelque chose dans le jeu de Rosamund Pike dans la première partie du film, un second visionnage s'impose quand même). Le rythme du film, faussement lent, rebutera ceux qui ont besoin d'une coupe toutes les 15 secondes et d'un rebondissement toutes les 5 minutes pour maintenir leur attention, mais c'est le moyen de laisser se développer le doute.