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Sombre

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Johan Scipion:
Covid - épisode 5/12





Previously : 2014 fut en demi-teinte, mais je me suis rattrapé en 2015. 2016 a été ma meilleure année. Par la suite, effritement des ventes.

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Je n'ai évidemment pas attendu 2019 pour revoir ma stratégie. Depuis longtemps, je cogite à la manière d'accompagner le mouvement. Comme je l'ai expliqué dans la première saison de mon feuilleton, je ne pense pas pouvoir redresser la barre, mais voudrais faire durer la revue. J'élabore un plan. On est dans les premiers mois de 2019, il y a un peu plus d'un. Je veux une transition douce, et y suis de toute façon contraint.

À ce stade, la revue Sombre est devenue une sorte de gros paquebot éditorial. Si elle peut toujours prendre des virages, il faut désormais que le capitaine les anticipe pas mal. Tout un tas de paramètres entrent en ligne de compte, de l'équilibrage des sommaires à la fiscalité, en passant par l'organisation des playtests. Donc brainstorming plus plus plus pour essayer de mettre toutes les chances de mon côté. Y'a de l'enjeu. À moyen terme, je joue l'avenir de mon zine et de mon taf, soit une partie importante de ma vie. Il vaudrait mieux que je ne me vautre pas.

Le plan est en trois volets. D'abord, continuer à réduire les convs. Je n'ai plus l'âge de les enquiller comme un taré. Il y a la fatigue, que j'évoquais hier, mais aussi quelque chose de plus profond, de l'ordre de la midlife crisis. J'ai conscience d'être à la charnière. Je vieillis et, créativement parlant, en ressens les effets. Je perds en souplesse intellectuelle. Par contre, j'ai accumulé de l'expérience et du savoir-faire. Au global, je suis dans mes bonnes années d'auteur : encore suffisamment jeune pour avoir des idées pas trop moisies, et assez expérimenté pour être en mesure de les concrétiser au mieux.

Très conscient que cette fenêtre créative ne durera pas, je veux en profiter pour produire. J'ai des trucs à écrire, nom de Dieu ! Or les convs me ralentissent. Elles cassent mes élans. Je me mets dans un texte. Au début, c'est un peu galère, puis ça commence à venir, et pile quand je suis bien chaud, je dois débrayer pour un event. Un jour de prépa, un week-end de taf super intense, deux ou trois journées pour m'en remettre. Quand je reviens à mon texte, je ne suis plus dedans. Grosse frustration.

C'est saisonnier. Les convs cartonnent au printemps et en automne. En été et en hiver, j'ai plus de temps pour écrire. J'en voudrais d'avantage parce que j'ai envie de sortir plus de textes. Envie et besoin. C'est le second volet de mon plan. Je veux passer à plus de deux numéros par an. Tactique éditoriale classique : quand tu vends moins par titre, tu augmentes le nombre de titres en espérant continuer à vendre au total autant. La surproduction actuelle dans le secteur de l'édition, c'est rien que ça. La mode est à la pléthore.

Du coup, je voudrais m'y mettre aussi. Bête effet Panurge, hein. Hé mais c'est que moi aussi, je veux tuer des arbres ! Plaisanterie mise à part, j'ai pris goût aux hors-séries et voudrais en publier plus. Je peux y mettre plein de textes que je kiffe mais qui n'entreraient qu'au chausse-pied dans les numéros réguliers.


La suite demain.

Johan Scipion:
Covid - épisode 6/12





Previously : pour ralentir l'effritement des ventes du fanzine, j'ai cogité à une stratégie. Un plan en trois volets, dont le premier consiste à réduire les conventions, et le second à publier plus de fanzines.

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Sortir trois ou quatre numéros par an est un gros taf. Pour y réussir, il va falloir que je les groupe. Je ne peux pas en publier un par trimestre, ce ne serait pas gérable. Pas si je veux assurer un minimum de convs en parallèle. Or je le dois. Les convs, même si j'ai réduit, j'aime toujours. Et financièrement, je ne peux pas m'en passer. C'est de la vente directe. Celle qui, en l'absence d'intermédiaires, nous fait vivre, Sombre et moi. Par ailleurs, grouper la production des nouveautés me permettrait de maintenir mes volumes d'impression, ce qui est crucial. Le défaut est que pour y parvenir, je dois enchaîner les bouclages. Hardcore comme c'est, je décide d'y aller mollo.

Deux numéros sur 2019, pour lancer Max. Puis en 2020, montée en puissance : un numéro au printemps, deux en automne. C'est jouable, j'ai du matos d'avance. Depuis Sombre 4, j'ai commencé à bosser sur le temps long. Les trois premières années, je ne savais pas si la revue avait vraiment un avenir, donc je ne projetais rien. Puis la phase ascendante de ma courbe de Gauss m'a donné assez d'assurance pour planifier plusieurs numéros à l'avance. Et commencer à les écrire. Résultat, j'ai quelques textes sous le coude, de quoi amortir un peu l'effet double bouclage.

Simultanément, et c'est le troisième volet de mon plan machiâââvélique, je lance une formule d'abonnement. J'y pense depuis le début de la revue, mais ai toujours repoussé parce que je n'étais pas certain de pouvoir tenir la périodicité. Le souvenir de 2014, mon année blanche, me hante encore. Cela me paraît le minimum du respect envers des abonnés que d'assurer des sorties à peu près régulières. Je ne prévois pas de formule d'abonnement pour X années, plutôt pour Y numéros, mais quand même, il faut que les lecteurs puissent se dire qu'en s'abonnant, ils ont une chance raisonnable de recevoir les zines promis avant que leur petit dernier ne rentre à l'université. C'est une double question de confiance, d'eux en moi, et de moi en moi. Pour me lancer, je dois pouvoir me dire que je peux assurer. En toute franchise, je le pense. Sortir trois numéros sur 2020 me semble jouable. Je suis rodé maintenant. Y'a moyen.

Mon idée est d'articuler montée en puissance éditoriale et abonnement. Je sors plus de nouveautés, donc je crée plus de buzz, donc j'attire plus d'abonnés. Une spirale vertueuse pour contrer Gauss. Du moins, si j'arrive à accrocher assez de gens. Pour redresser les ventes, il faut que je parvienne à intéresser plus que les hardcore fans. Par définition, eux m'achètent déjà tous les numéros.

Or l'impact positif des abonnements ne se fera réellement sentir que si je parviens à y rallier les fans un poil moins hardcore. Ceux qui ne seraient pas contre m'acheter tous les numéros, mais auraient besoin que je leur simplifie la vie. Un paiement groupé, des frais de port allégés, toutes ces petites douceurs de la condition d'abonné. Si ça marche, j'étoffe le noyau dur du lectorat de la revue, et ainsi résiste mieux à l'érosion des ventes. Un plan sans accroc, à la Hannibal Smith.


La suite demain.

Johan Scipion:
Covid - épisode 7/12





Previously : pour ralentir l'effritement des ventes du fanzine, j'ai cogité à une stratégie. C'était il y a un an, et depuis je travaille à la déployer.

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Automne 2019, après la sortie de Sombre HS4, j'enchaîne sur les dernières conventions de l'année et la vente aux boutiques. Le tempo éditorial est bon car le hors-série est paru tôt, en septembre. Ayant bien turbiné durant l'été, je me retrouve pour une fois à faire un truc après l'autre, ce qui m'évite l'épuisement. J'apprécie.

Ce d'autant que niveau préparation de commandes, ce ne sont pas non plus les cadences infernales (effet Gauss et tout ça). Résultat, je trouve en parallèle le temps de me mettre tranquille à l'écriture. Serein, le gars Johan. Le nouveau numéro avance bien. Je suis dans les temps pour une parution en début d'année prochaine. Autour de février, mars au plus tard.

Mais.

Mais à mesure que je bosse sur ce numéro, je ressens de plus en plus l'envie d'en sortir un second, qui le compléterait. Je n'entre pas dans les détails de l'articulation de leurs sommaires car je vous en reparlerai bientôt. Sachez seulement qu'au départ, je repousse l'idée. J'ai un plan, nom de Dieu, et veux m'y tenir. Sauf qu'au fil de l'écriture, le diptyque s'impose avec tellement de force que courant janvier, je dois céder. Advienne que pourra, je décide de tenter le double bouclage. Je l'ai déjà fait en 2016, pas de raison que je ne puisse pas le refaire.

De toute façon, c'est déjà mon plan pour l'automne 2020. La différence est que ce double bouclage automnal, je l'ai prévu à l'avance et ai donc préparé le terrain. J'ai déjà pas mal de matos carré. J'ai même pris le temps de bosser dessus (écriture et playtest) à la fin de 2019, au détriment bien sûr de mon numéro du printemps 2020. Ce qui ne posait pas de problème à l'époque, vu que j'étais largement dans les temps. Ouais mais ça, c'était avant de me mettre un second numéro sur le dos. Là, ça vire supra tendu. Le premier bouclage, sans problème. Le second, chaud patate. Donc je réagis.


La suite demain.

Johan Scipion:
Covid - épisode 8/12





Previously : pour ralentir l'effritement des ventes du fanzine, j'ai un plan. Début 2019, je décide de publier deux numéros printaniers au lieu d'un seul. Gros taf.

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Pour pouvoir double boucler dans les temps, je commence par alléger mon calendrier de convs. J'annule une date en février, une autre en mars, et refuse une invitation pour début avril. Je ne garde que trois events, dont Orc'Idée à la mi-avril, qui devient ma date butoir. Aller en Suisse sans mes premières nouveautés de 2020 serait un crève-cœur. La deadline est tenable, faut quand même que j'y mette pas mal du mien. Donc je bosse de chez taf.

Mi-février, je m'autorise une pause playtest. Trois séances, une longue et deux courtes, qui, entre la prépa, les parties elles-mêmes et les comptes rendus, me bouffent une grosse semaine. Le risque est calculé. Rétrospectivement, je ne regrette pas de l'avoir pris. Primo, ce fut super cool. Gros fun de réunir des potes dans ma cuisine, ça m'a bien vidé la tête. Secundo, ces séances m'ont permis d'aboutir mon cycle de playtest pour le premier numéro de 2021, ceux des numéros de 2020 étant évidemment achevés depuis longtemps (je m'étais organisé courant 2019). Dans le contexte de confinement actuel, je me dis que j'ai vraiment bien fait car je ne sais pas du tout quand je serai en mesure d'organiser une nouvelle séance du Kitchen Club.

Reste que sur le moment, cela me coûte une semaine. Or dans le même temps, je dois accompagner la sortie d'un webzine Sombre lancé par deux fans. Comme c'est leur premier numéro, il y a évidemment quelques boulons d'orga à serrer. Voilà que je me retrouve à rédiger des mails longs comme le bras à des heures indues. Chronophage au possible. Je perds du temps putain.

Résultat, l'écriture du second numéro n'avance pas comme elle le devrait. Et ralentit encore lorsque je suis contraint de débrayer pour préparer la campagne de com' autour de ma formule d'abonnement. C'est un tel enjeu que pour mettre toutes les chances de mon côté, j'ai prévu un feuilleton en une quinzaine de jours. Sa rédaction m'a pris énormément de temps. Une bonne grosse tartine de texte, que je me suis efforcé de fignoler pour être le plus efficace possible.

La mise en ligne elle-même m'a beaucoup mobilisé, ce qui ne m'a pas surpris. À force, j'ai pris la mesure de la promo sur le Net. C'est un vrai travail. En l'occurrence, deux semaines à peaufiner mes épisodes à mesure de leur mise en ligne, et à répondre aux réactions des internautes, pour la quasi-totalité fort sympathiques. Community manager, quoi.


La suite demain.

Johan Scipion:
Covid - épisode 9/12





Previously : début 2019, je décide de publier deux numéros printaniers au lieu d'un seul. Gros taf qui n'avance pas à la vitesse où je le voudrais.

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Dès que j'ai le temps, je bosse sur les textes de mon deuxième zine. Comme attendu, je tire la langue. Deux bouclages de suite, c'est vraiment rude. J'avance dans la mélasse. Or les premières convs, celles que je n'ai pas annulées, arrivent à grands pas. Impossible de me désister, les dates sont désormais trop proches.

Et puis, je ne le peux pas. Je n'ai quasi rien vendu depuis Noël, il faut que je retourne en convention pour y fourguer du zine. Je dois faire rentrer des sous et écouler mon stock pour être en capacité de réimprimer certains anciens numéros en complément de mes nouveautés. Ces tirages en amalgame me permettent de maintenir plus ou moins mes volumes d'impression, alors même que, Gauss oblige, je tire toujours moins de chaque nouveau numéro.

Au final, je m'attends à devoir boucler pendant la saison haute des conventions, ce qui est le pire du pire. D'expérience, c'est super fatiguant. Impossible de se poser, faut enchaîner écriture, correction, impression, promotion et distribution, tout en consacrant certains week-ends aux events. Mon printemps s'annonce brutal, mais à ce stade, plus moyen de moyenner. Faudra faire avec.

Pendant ce temps-là, de l'autre côté du monde, le Covid met la Chine en vrac. Je n'y prête que peu d'attention, je l'avoue. J'ai du boulot par-dessus les yeux et, ne connaissant pas grand-chose à la médecine, gobe tout cru la com' lénifiante sur la « grippette ». Johan, ce Français moyen. En fait, j'ai commencé à comprendre que la pression montait en apprenant les annulations en cascade de nombreuses conventions. Je n'ai pas trop d'antennes dans le milieu médical, mais suis assez bien connecté à celui de l'événementiel.

Sauf que dans la première semaine de mars, j'étais encore loin d'imaginer qu'on en arriverait si vite au confinement. De toute façon, ma promo était lancée. Mon feuilleton Sombre déjà en route, je ne pouvais plus faire machine arrière. Vu que les conventions de mars et d'avril étaient toutes annulées, il devenait crucial de sauver les meubles en assurant la promotion de la formule d'abonnement, et en enchaînant vite avec la parution de mes nouveautés printanières. Si je ne pouvais pas vendre en direct sur les convs, au moins resterait-il la VPC, me disais-je, tout plein de candeur, sans bien réaliser que l'épidémie flambait déjà en Italie.


La suite demain.

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